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Le rationalisme est la doctrine qui pose les raisons discursives comme seule source possible de toute connaissance du monde. Autrement dit, la réalité ne serait connaissable qu'en vertu d'une explication par les causes qui la déterminent et non par une quelconque révélation ou intuition. Ainsi, le rationalisme s'entend de toute doctrine qui attribue à la seule raison la capacité de connaître et d'établir la vérité.

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Cet article ne cite pas suffisamment ses sources (novembre 2021).

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René Descartes
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Baruch Spinoza
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Gottfried Leibniz

Dans son acception classique, il s'agit de postuler que le raisonnement consiste à déterminer que certains effets résultent de certaines causes, uniquement à partir de principes logiques ; par exemple dans les théorèmes mathématiques qui parviennent à certaines conclusions en fonction des hypothèses admises au départ.[pas clair]. De plus, et en particulier, les principes logiques eux-mêmes utilisés dans le raisonnement ont été connus par déduction[réf. nécessaire].

Le rationalisme s'oppose à l'irrationalisme et, historiquement (avec en particulier Descartes et Leibniz), à l'empirisme.

Précisions terminologiques

On trouve couramment et identiquement les expressions de « rationalisme moderne » ou de « rationalisme classique » pour désigner le rationalisme tel qu’il se formule de Descartes à Leibniz, correspondant à peu près à ce que l’on peut appeler depuis Kant le « rationalisme dogmatique » :

  • Le rationalisme est dogmatique, lorsque la raison, considérée comme seule source déterminante de la connaissance, et par ses seuls principes a priori, prétend atteindre la vérité, particulièrement dans le domaine métaphysique.
  • L'expression « rationalisme moderne » vise à le situer dans l’histoire de la pensée conformément à la terminologie d’usage (la période moderne commençant au XVIe siècle, après la période du Moyen Âge) et le distinguant du statut de la raison dans la philosophie antique, tel qu’on le trouve chez Platon et Aristote par exemple.
  • L'expression « rationalisme classique » vise à le distinguer d’un rationalisme élargi et renouvelé, « modernisé », par la critique kantienne et l’apport des sciences expérimentales : « rationalisme critique » pour Kant et Karl Popper, « rationalisme appliqué » chez Gaston Bachelard…
  • On trouve également l’expression « rationalisme continental » pour le distinguer et l’opposer à l’empirisme anglo-saxon (Hobbes, Locke, Hume, etc.).

Nous suivrons ici une terminologie distinguant un rationalisme moderne (de Descartes à Leibniz), d’un rationalisme critique pour désigner généralement le rationalisme kantien et post-kantien, indépendamment des nuances, parfois sensibles, dont il se compose.

Le mot de rationalisme fut également utilisé avant la Renaissance, et pendant le Moyen Âge : il s'agissait alors de rationalisme en théologie.

Sources dans la Grèce antique

L’attitude intellectuelle visant à placer la raison et les procédures rationnelles comme sources de la connaissance remonte à la Grèce antique, lorsque sous le nom de logos (qui signifie à l'origine discours), elle se détache de la pensée mythique et, à partir des sciences, donne naissance à la philosophie.

Platon ne voit dans la sensibilité qu’une pseudo connaissance ne donnant accès qu’à la réalité sensible, matérielle et changeante du monde. Se fier à l’expérience sensible, c’est être comme des prisonniers enfermés dans une caverne qui prennent les ombres qui défilent sur la paroi faiblement éclairée, pour la réalité même. « Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre », fait-il graver au fronton de son école : l’exercice des mathématiques nous apprend à nous détacher de nos sens et à exercer notre seule raison, préalable nécessaire à la dialectique philosophique. La connaissance du réel est connaissance des Idées ou essences, réalités intelligibles et immuables, et cette connaissance est rationnelle. Il y a en ce sens un rationalisme platonicien.

Aristote, au contraire, appuie sa philosophie sur l'observation concrète de la nature (physis), et pose les bases :

  • de la logique formelle, dans son Organon (nous l'appellerions aujourd'hui logique générale),
  • de ce que l'on appela par la suite la métaphysique (au-delà de la physis, c'est-à-dire au-delà de la nature),
  • de l'éthique (éthique à Nicomaque).

Rationalisme moderne

Origine et caractéristiques du rationalisme moderne

Ce n’est pas l’usage de la raison, ni sa revendication, qui suffit à définir le rationalisme comme doctrine. Le rationalisme moderne se constitue et se systématise à la fin de la Renaissance, dans le cadre de la controverse ptoléméo-copernicienne, qui aboutit à la mathématisation de la physique. Après le procès de Galilée (1633), et conforté dans le projet de réformer la philosophie dont le cardinal de Bérulle lui avait fait une « obligation de conscience » quelques années auparavant, René Descartes concrétise son projet en publiant plusieurs ouvrages de philosophie, notamment le célèbre Discours de la méthode (1637), et les Méditations métaphysiques (1641). Descartes, avec son Cogito ergo sum, devient ainsi l'un des principaux représentants du rationalisme moderne.

Le rationalisme moderne repose sur le postulat métaphysique selon lequel les principes qui sous-tendent la réalité sont identiques aux lois de la raison elle-même. Ainsi en est-il du principe de raison déterminante (ou de raison suffisante) que Leibniz, dans les Essais de Théodicée (1710), formule de la manière suivante :

« C’est que jamais rien n’arrive, sans qu’il y ait une cause ou du moins une raison déterminante, c’est-à-dire quelque chose qui puisse servir à rendre raison a priori, pourquoi cela est existant plutôt que non existant, et pourquoi cela est ainsi plutôt que de toute autre façon. »

Puisque rien n'existe ou n’arrive sans cause, il n’est rien, dès lors, qui ne soit, en droit, intelligible et explicable par la raison. Dans le cadre de l’onto-théologie, cette identité de la pensée et de l’être trouve sa justification ultime en Dieu, créateur du monde et de ses lois d’une part, de la raison humaine et de ses principes d’autre part. Ce en quoi le rationalisme ainsi compris s'accomplit pleinement dans l'idéalisme philosophique, auquel Hegel donnera sa forme la plus systématique, dans la formule : « ce qui est rationnel est effectif, et ce qui est effectif est rationnel » (Préface des Principes de la philosophie du droit).

Il en résulte que la raison, contenant des principes universels et des idées a priori exprimant des vérités éternelles, est immuable et identique en chaque homme. C’est en ce sens que Descartes, dans le Discours de la méthode, écrit : « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée », précisant que « la puissance de bien juger et distinguer le vrai d’avec le faux, qui est proprement ce qu’on nomme le bon sens ou la raison, est naturellement égale en tous les hommes ».

Du point de vue de l’origine de nos connaissances, le rationalisme est traditionnellement opposé à l’empirisme, à l’irrationalisme, et à la révélation.

Rationalisme et empirisme

Selon l’empirisme, l’expérience est la source de toutes nos connaissances. Comme l'explique John Locke dans l’Essai sur l’entendement humain de 1690 :

« Supposons que l’esprit soit, comme on dit, du papier blanc (tabula rasa), vierge de tout caractère, sans aucune idée. Comment se fait-il qu’il en soit pourvu ? D’où tire-t-il cet immense fonds que l’imagination affairée et limitée de l’homme dessine en lui avec une variété presque infinie ? D’où puise-t-il ce matériau de la raison et de la connaissance ? Je répondrai d’un seul mot : de l’expérience ; en elle, toute notre connaissance se fonde et trouve en dernière instance sa source. »

Cette expérience, c’est celle de nos sens externes, qui nous permet par exemple de former l’idée de couleur, mais aussi celle de notre pensée en acte, par laquelle nous sommes capables de former l’idée de pensée, ou de raisonnement.

Une telle position conduit à une dévalorisation de la raison : une idée n’est, aux yeux de David Hume, qu’une « copie d’une impression analogue », de sorte que « tout ce pouvoir créateur de l’esprit n’est rien de plus que la faculté de combiner, transposer, diminuer les matériaux que nous fournissent les sens et l’expérience » (Enquête sur l’entendement humain, 1748), combinaisons qu’il opère selon des relations de ressemblance ou de contiguïté.

Du point de vue de l’empirisme donc, « il n’est rien dans l’intellect qui n’ait été d’abord dans la sensibilité », ce à quoi Leibniz rétorquera « sauf l’intellect lui-même ».

Le rationalisme postule, en effet, l’existence en la raison de principes logiques universels (principe du tiers exclu, principe de raison suffisante) et d’idées a priori, c’est-à-dire indépendantes de l’expérience et précédant toute expérience. Ainsi Descartes admet-il l'existence d'idées a priori et innées telles que l'idée d'infini, de temps, de nombre, ou l'idée même de Dieu qui est « comme la marque de l’ouvrier sur son ouvrage », idées simples et premières, sans lesquelles l’expérience sensible nous resterait inintelligible : « je considère qu’il y a en nous certaines notions primitives, qui sont comme des originaux, sur le patron desquels nous formons toutes nos autres connaissances » (Lettre à Elisabeth du 21 mai 1643).

Aux yeux du rationalisme, en effet, l’expérience sensible ne saurait donner de connaissance véritable. Platon déjà en dénonçait le caractère fluctuant et relatif, qui ne nous montre qu’un jeu d’ombres inconsistant, et Descartes, dans la première Méditation métaphysique, le caractère trompeur :

« Tout ce que j’ai reçu jusqu’à présent pour le plus vrai et assuré, je l’ai appris des sens ou par les sens : or j’ai quelquefois éprouvé que ces sens étaient trompeurs, et il est de la prudence de ne se fier jamais entièrement à ceux qui nous ont une fois trompés. »

Le rationalisme, cependant, nous le verrons plus bas sous sa forme critique, ne répudie pas l’expérience sensible mais la soumet à des formes a priori qui la rendent possible et en organisent le donné.

Rationalisme et irrationalisme

Il faut entendre ici par irrationalisme la référence à toute expérience ou toute faculté autre que la raison et n’obéissant pas à ses lois, supposée donner une connaissance plus profonde et plus authentique des phénomènes et des êtres, et laissant place à une frange d’ineffable, de mystère, ou d’inexplicable. Le rationalisme s’oppose en ce sens au mysticisme, à la magie, à l’occultisme, au sentimentalisme, au paranormal ou encore à la superstition. Seuls font autorité les processus rationnels : évidence intellectuelle, démonstration, raisonnement.

C’est au sentimentalisme romantique que s’en prend Hegel dans la préface à la Phénoménologie de l'esprit, lorsqu’il évoque cette prétendue philosophie qui « par l’absence de concept se donne pour une pensée intuitive et poétique, jette sur le marché des combinaisons fantaisistes, d’une fantaisie seulement désorganisée par la pensée – fantastiqueries qui ne sont ni chair, ni poisson, ni poésie, ni philosophie ». Celui qui prétend toucher la vérité dans l’expérience ineffable du sentiment intime se condamne au silence et à la solitude de l’incommunicabilité ; « en d’autres termes, il foule aux pieds la racine de l’humanité ».

Rationalisme et révélation

D’un point de vue théologique, le rationalisme met en avant la lumière naturelle de la raison par opposition à la connaissance révélée que constitue la foi. Contre le fidéisme, il demande que les articles de la foi et les Écritures elles-mêmes soient soumis à l’examen rationnel.

Spinoza, dans le Traité théologico-politique, développe une lecture critique de l’Ancien Testament.

Descartes, dans la préface « aux Doyens et docteurs de la faculté de théologie de Paris » qui précède les Méditations métaphysiques, affirme que « tout ce qui se peut savoir de Dieu peut être montré par des raisons qu’il n’est pas besoin de chercher ailleurs que dans nous-mêmes, et que notre esprit seul est capable de nous fournir ». Selon lui en effet, parallèlement à la théologie révélée, la seule raison nous permet de démontrer l'existence de Dieu par l'argument ontologique, de sorte que l’existence de Dieu découle nécessairement de son essence, comme il découle nécessairement de l’essence du triangle que la somme de ses angles égale deux angles droits.

Ainsi, pour Descartes, la recherche de la vérité peut se faire par la raison seule, sans la lumière de la foi (les Principes de la philosophie). Le cogito ergo sum postule que l'homme est une substance intelligente qui peut accéder à la vérité.

Rationalisme critique

Le rationalisme critique, issu de l’entreprise kantienne, peut se caractériser par trois traits :

  • Le renoncement à ses prétentions dogmatiques et métaphysiques.
  • L’intégration de l’expérience au sein d’une dialectique expérimentale.
  • La reconnaissance par la raison elle-même de ses limites et de son historicité.

Synthèse kantienne

Le développement de la physique expérimentale moderne, à la fin de la Renaissance, avec les figures majeures de Galilée, Torricelli, et Newton, va peu à peu conduire à une révision du statut de la raison dans ses relations avec l’expérience. « Hypotheses non fingo », « je ne forge pas d’hypothèses », déclare Newton : la science de la nature réclame l’observation des faits, et ne peut découler de seuls principes a priori. Kant, très attentif à cette question, en prend acte dans la Critique de la raison pure. Il y distingue trois facultés :

  • La sensibilité ou faculté des intuitions empiriques, par laquelle quelque chose nous est donné.
  • L’entendement ou faculté des concepts. Les catégories pures de l’entendement sont les règles qui nous permettent d’organiser a priori l’expérience, par exemple la relation de causalité.
« Aucune de ces deux propriétés n’est préférable à l’autre. Sans la sensibilité, nul objet ne nous serait donné et sans l’entendement nul ne serait pensé (…) De leur union seule peut sortir la connaissance. Connaître, c’est donc appliquer des concepts à des intuitions, de telle sorte que « des pensées sans contenu sont vides, des intuitions sans concepts, aveugles ». »
  • La raison ou faculté des Idées. Une Idée ne pouvant correspondre à aucun objet donné dans l’expérience (Dieu, l’immortalité de l’âme, la liberté), de tels objets suprasensibles ne peuvent donc être objets de connaissance au sens défini plus haut.

On peut par conséquent estimer que Kant opère la synthèse entre l’empirisme et le rationalisme, en donnant droit à l’un comme à l’autre. Mais cette synthèse s’opère en réalité dans le sens d’un rationalisme critique :

« Que toute notre connaissance commence avec l’expérience, cela ne soulève aucun doute […] Mais si toute notre connaissance débute avec l’expérience, cela ne prouve pas qu’elle dérive toute de l’expérience. »

Le donné empirique en effet, donné certes irréductible à la raison, ne peut être organisé et donner lieu à une connaissance qu’à travers les formes a priori de notre esprit :

  • formes a priori de la sensibilité elle-même, que sont l’espace et le temps,
  • catégories pures de l’entendement qui constituent pour ainsi dire la structure logique inhérente à notre esprit, structure dans laquelle nous mettons en forme les données issues de la sensibilité pour en opérer la synthèse, et dont dérivent toutes les fonctions logiques de nos jugements. (Pour le tableau complet des catégories, voir l’article Critique de la raison pure)

Si bien que la réalité nous reste à jamais inconnaissable : nous n’avons accès qu’à une réalité phénoménale.

Si donc Kant se détourne du postulat cartésien des idées simples et innées constitutives d’une connaissance pure indépendante de l’expérience (dogmatisme), c’est pour leur substituer les catégories pures de l’entendement qui sont la condition de possibilité de toute expérience possible.

Abandon des prétentions métaphysiques

En conséquence de la critique kantienne, prétendre connaître des objets suprasensibles relève d’un usage illégitime de la raison. Ainsi se trouvent invalidées les tentatives de démonstration rationnelle de l’existence de Dieu : contre l’argument ontologique de Saint Anselme et de Descartes, Kant explique que du simple concept de Dieu, on ne peut en déduire analytiquement l’existence. « J’ai donc dû supprimer le savoir pour lui substituer la croyance ».

C’en est fini des prétentions métaphysiques et du dogmatisme de la raison.

Dans les années 1830, Auguste Comte, en son Cours de philosophie positive, décrit en ces termes l’état positif, ou scientifique, auquel est enfin parvenue l’intelligence :

« Enfin, dans l’état positif, l’esprit humain, reconnaissant l’impossibilité d’obtenir des notions absolues, renonce à chercher l’origine et la destination de l’univers, et à connaître les causes intimes des phénomènes, pour s’attacher uniquement à découvrir, par l’usage bien combiné du raisonnement et de l’observation, leurs lois effectives, c’est-à-dire leurs relations invariables de succession et de similitude. »

Il s’agit désormais de comprendre comment un phénomène se produit. Les faits observables sont liés par des lois qui en expriment seulement les relations constantes.

C’est dans cette perspective qu’en 1964, E. Kahane, dans son Dictionnaire rationaliste, peut le définir de la manière suivante : « Le rationalisme comporte explicitement l'hostilité à toute métaphysique, le refus de tout inconnaissable a priori, et l'exclusion de tout autre mode allégué de connaissance, tel que la révélation, l'intuition réduite à elle seule, etc. ».

Dialectique expérimentale

Loin d’exclure l’expérience, le rationalisme kantien en fait l’une des deux sources de nos connaissances et réconcilie en ce sens rationalisme et empirisme. Mais il convient de préciser ce que l’on entend dès lors par « expérience » :

Elle ne saurait consister, comme le croirait un empirisme naïf, en un fait brut, en une vérité du réel se donnant à nous dans l’évidence du constat immédiat. Sans la médiation de la raison en effet, l’expérience resterait muette et ne saurait rien nous enseigner. Les faits ne parlent pas d’eux-mêmes. Kant – il faut encore ici l’évoquer – y insiste longuement dans la Critique de la Raison Pure :

« [Les physiciens] comprirent que la raison ne voit que ce qu’elle produit elle-même d’après ses propres plans et qu’elle doit prendre les devants avec les principes qui déterminent ses jugements, suivant des lois immuables, qu’elle doit obliger la nature à répondre à ses questions et ne pas se laisser conduire pour ainsi dire en laisse par elle ; car autrement, faites au hasard et sans aucun plan tracé d’avance, nos observations ne se rattacheraient point à une loi nécessaire, chose que la raison demande et dont elle a besoin. Il faut donc que la raison se présente à la nature tenant, d’une main, ses principes qui seuls peuvent donner aux phénomènes concordants entre eux l’autorité de lois, et de l’autre, l’expérimentation qu’elle a imaginée d’après ces principes, pour être instruite par elle, il est vrai, mais non pas comme un écolier qui se laisse dire tout ce qui plaît au maître, mais, au contraire, comme un juge en fonctions qui force les témoins à répondre aux questions qu’il leur pose. »

Ainsi, si vous forcez ou dressez un tigre à sauter au travers d'anneaux enflammés, vous pourrez en conclure tranquillement : « Le tigre est un animal qui saute au travers d'anneaux enflammés ».

Ce qui nous est ainsi schématiquement tracé, c’est la démarche de la science expérimentale telle qu’elle se dessine depuis Galilée :

  • Observation rigoureuse d’un phénomène que l’on cherche à expliquer
  • Formulation d’une hypothèse, qui est un énoncé que l’on peut soumettre à un test
  • Expérimentation, par l’élaboration d’un montage permettant d’éprouver la validité de l’hypothèse.

De la même façon qu’un « homme d’expérience » est non seulement un homme qui a vécu, mais un homme qui a su réfléchir à ce vécu pour en tirer des leçons, l’expérience pour le savant n’a de sens qu’en fonction de problèmes qu’il cherche à résoudre, et d’hypothèses rationnelles qu’il élabore à cette fin. Gaston Bachelard, dans Le Nouvel Esprit scientifique, l’explique en ces termes :

« […] une expérience ne peut être une expérience bien faite que si elle est complète, ce qui n’arrive que pour l’expérience précédée d’un projet bien étudié à partir d’une théorie achevée […] Les enseignements de la réalité ne valent qu’autant qu’ils suggèrent des réalisations rationnelles. »

Le dispositif expérimental, effectué en laboratoire, est rationnellement planifié et construit par le chercheur, en fonction des hypothèses qu’il veut tester. Il nécessite un appareillage complexe, qui est lui-même le résultat d’un effort théorique antérieur. Comme le précise Bachelard (op. cité) :

« […] il faut que le phénomène soit trié, filtré, épuré, coulé dans le moule des instruments, produit sur le plan des instruments. Or les instruments ne sont que des théories matérialisées. Il en sort des phénomènes qui portent de toutes parts la marque théorique. »

D’où l’expression, par ce même philosophe, de « rationalisme appliqué ».

L’expérience en laboratoire n’est donc pas le réel à l’état brut, mais un réel reconstruit et sélectif, dans lequel la vérité s’élabore à travers un ensemble d’opérations et de procédures rationnelles qui corrigent notre approche naïve et spontanée. « Rien n’est donné, tout est construit. » Se dessine en ce sens une dialectique expérimentale, un dialogue et une collaboration entre l’expérience et la raison, ouvrant la voie, selon l’expression de Bachelard, à une « épistémologie non cartésienne ».

Historicité de la raison

Avec la Phénoménologie de l'esprit, Hegel mettait en avant l’historicité d’une raison qui développe ses formes à travers l’histoire du monde. Comme le fait observer Gilles Gaston Granger, « la grande découverte hégélienne, c’est le caractère historique de la raison », et cette prise de conscience de l’historicité détermine le rationalisme contemporain. À une conception fixiste de la raison, telle qu’elle apparaît encore dans les catégories de l’entendement dont Kant entendait dresser une fois pour toutes le tableau complet, s’oppose désormais une conception dynamique de la raison, toujours liée au contexte historique et épistémologique dans lequel elle se déploie.

Bachelard, en introduisant dans La formation de l’esprit scientifique (1938) la notion d’obstacle épistémologique, veut montrer une pensée rationnelle en prise à des « crises de croissance » :

« C’est dans l’acte même de connaître, intimement, qu’apparaissent, par une sorte de nécessité fonctionnelle, des lenteurs et des troubles. C’est là que nous montrerons des causes de stagnation et même de régression, c’est là que nous décèlerons des causes d’inertie que nous appellerons des obstacles épistémologiques. »

Les conquêtes progressives du rationalisme se font dès lors contre la raison elle-même, de sorte qu’« en revenant sur un passé d’erreurs, on trouve la vérité en un véritable repentir intellectuel ». Passé d’erreurs : généralisation hâtive de la connaissance, habitudes verbales, pragmatisme, substantialisation, réalisme naïf qui sont autant d’obstacles que la science dresse face à elle-même. « Préciser, rectifier, diversifier, ce sont là des types de pensées dynamiques qui s’évadent de la certitude et de l’unité et qui trouvent dans les systèmes homogènes plus d’obstacles que d’impulsions ». L’esprit rationnel, dans le cadre des sciences, doit être un esprit critique toujours en alerte devant ses propres facteurs d’inertie, toujours prompt à remettre en question ses propres conquêtes. « Reste ensuite la tâche la plus difficile : mettre la culture scientifique en état de mobilisation permanente, remplacer le savoir fermé et statique par une connaissance ouverte et dynamique, dialectiser toutes les variables expérimentales, donner enfin à la raison des raisons d’évoluer ».

Dans un même ordre d’idées, Karl Popper, dans La logique de la découverte scientifique, tente de montrer que le caractère d’une théorie scientifique tient à sa réfutabilité. On ne peut en effet, à partir d’expériences singulières, aussi nombreuses soient-elles, conclure à l’universalité d’une loi. Mais on peut la tester : il suffit de montrer une seule observation contraire à un énoncé universel pour être certain que cet énoncé est faux. Le vrai n’est donc pas la simple réciproque du faux, de sorte qu’on ne peut vérifier une hypothèse, mais seulement essayer de l'infirmer. Une théorie ne sera dès lors tenue pour vraie qu’autant qu’elle résistera aux tests expérimentaux pour la mettre en échec. C’est dire par conséquent que la science progresse par réfutations et expérimentation : rien n’est définitif, la vérité est toujours provisoire.

La raison n’est plus conçue comme un système clos et rigide de principes déterminés a priori, mais bien comme une réalité plastique et dynamique, comme un processus constructif, dont témoigne l’histoire même de la connaissance. Ce que l’on considère comme étant une explication rationnelle dépend donc étroitement du contexte historique dans lequel elle est formulée, de l’état des connaissances, et de l’évolution des techniques d’observation et d’expérimentation. Le concept de probabilité, par exemple, introduit dans les modèles complexes de la science des particules, ou celui de modèle local, ne pouvaient intervenir à titre d’explication rationnelle dans le cadre de la physique galiléenne ou newtonienne. Comme le précise Gilles Gaston Granger : « Ainsi la science progresse-t-elle par dépassements successifs des formes périmées de la raison […] L’irrationalité véritable apparaît donc plutôt comme une régression vers des formes anachroniques de l’explication. »[réf. nécessaire]

Tel se veut le rationalisme critique, élargi : un rationalisme débarrassé de ses préjugés métaphysiques, intimement mêlé au développement des sciences, qui se construit par dépassement de ses propres formes historiques, et issu d’une conception dynamique de la raison.

Critique contemporaine du rationalisme moderne

Hans Jonas, dans Le Phénomène de la vie, vers une biologie philosophique, fut l'un des premiers à critiquer le dualisme cartésien entre le corps et l'esprit : « Le dualisme cartésien laissa la spéculation sur la nature de la vie dans une impasse : si intelligible que devint, selon les principes de la mécanique, la corrélation de la structure et de la fonction à l'intérieur de la res extensa, celle de la structure accompagnée de fonction avec le sentiment ou l'expérience (modes de la res cogitans) fut perdue dans la séparation et par là le fait de la vie lui-même devint inintelligible au moment même où l'explication de son effectuation temporelle semblait assurée ».

Le dualisme cartésien et l'absence de finalisme dans la technoscience sont pour Vittorio Hösle, disciple de Hans Jonas, les causes principales de la crise écologique.

Le sociologue italien Franco Ferrarotti remet en cause le rationalisme mécaniste, dont Descartes est l'une des sources.

Selon Jean-Claude Larchet, en faisant de la raison la principale faculté de connaissance de l'homme, on relègue au second plan son esprit ou intellect, faculté de contemplation des réalités surnaturelles. La valorisation de la raison et de l'approche rationnelle des phénomènes favorise non seulement le développement d'une forme de philosophie qui s'affranchit de la théologie dont elle n'était jusqu'alors que la servante, mais encore l'essor des sciences, qui se développeront considérablement à partir du XVIIe siècle à la suite de la révolution copernicienne.

Point de vue chrétien

  • Le Syllabus de Pie IX du 8 décembre 1864 condamne le rationalisme comme incompatible avec la foi.
  • L'Encyclique Fides et ratio de Jean-Paul II du 14 septembre 1998 analyse les rapports entre la foi et la raison.

Point de vue artistique

  • Il existe un courant architectural rationaliste (voir Architecture rationaliste).

Notes et références

  1. G. G. Granger, La raison, P.U.F ‘Que sais-je ?’, 1955.
  2. Hans Jonas, Le phénomène de la vie, vers une biologie philosophique, De Boeck Université, p. 69, lire en ligne
  3. Vittorio Hösle, Philosophie de la crise écologique, Payot, 2011, p. 80
  4. Franco Ferrarotti, « La révolte contre le rationalisme mécaniste », Sociétés 2005/1 (no 87), pages 91 à 100, 2005, lire en ligne, consulté le 26/09/2020
  5. Jean-Claude Larchet, Les fondements spirituels de la crise écologique, Syrtes, p. 73-74

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

  • rationalisme, sur le Wiktionnaire

Bibliographie

  • René Descartes, Discours de la Méthode, 1637.
  • René Descartes, Méditations sur la philosophie première, 1641.
  • Baruch Spinoza, Traité théologico-politique, 1670.
  • Gottfried Wilhelm Leibniz, Nouveaux Essais sur l'entendement humain, 1705.
  • Emmanuel Kant, Critique de la Raison pure, 1781, seconde édition 1787.
  • Georg Wilhelm Friedrich Hegel, La Phénoménologie de l'Esprit, 1807.
  • Auguste Comte, Cours de philosophie positive, 1830-1842.
  • Gaston Bachelard, Le Nouvel Esprit scientifique, 1934.
  • Gaston Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique, 1938.
  • Karl Popper, La Logique de la découverte scientifique, 1934, ed. française Payot.
  • Gilles Gaston Granger, Pour la connaissance philosophique, Paris, Éditions Odile Jacob, 1988.

Articles connexes

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  • Rationalisation
  • Philosophie analytique
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Liens externes

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Auteur: www.NiNa.Az

Date de publication: 25 Mai, 2025 / 18:27

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Pour les articles homonymes voir rationalisme architecture Le rationalisme est la doctrine qui pose les raisons discursives comme seule source possible de toute connaissance du monde Autrement dit la realite ne serait connaissable qu en vertu d une explication par les causes qui la determinent et non par une quelconque revelation ou intuition Ainsi le rationalisme s entend de toute doctrine qui attribue a la seule raison la capacite de connaitre et d etablir la verite Si ce bandeau n est plus pertinent retirez le Cliquez ici pour en savoir plus Cet article ne cite pas suffisamment ses sources novembre 2021 Rene DescartesBaruch SpinozaGottfried Leibniz Dans son acception classique il s agit de postuler que le raisonnement consiste a determiner que certains effets resultent de certaines causes uniquement a partir de principes logiques par exemple dans les theoremes mathematiques qui parviennent a certaines conclusions en fonction des hypotheses admises au depart pas clair De plus et en particulier les principes logiques eux memes utilises dans le raisonnement ont ete connus par deduction ref necessaire Le rationalisme s oppose a l irrationalisme et historiquement avec en particulier Descartes et Leibniz a l empirisme Precisions terminologiquesOn trouve couramment et identiquement les expressions de rationalisme moderne ou de rationalisme classique pour designer le rationalisme tel qu il se formule de Descartes a Leibniz correspondant a peu pres a ce que l on peut appeler depuis Kant le rationalisme dogmatique Le rationalisme est dogmatique lorsque la raison consideree comme seule source determinante de la connaissance et par ses seuls principes a priori pretend atteindre la verite particulierement dans le domaine metaphysique L expression rationalisme moderne vise a le situer dans l histoire de la pensee conformement a la terminologie d usage la periode moderne commencant au XVI e siecle apres la periode du Moyen Age et le distinguant du statut de la raison dans la philosophie antique tel qu on le trouve chez Platon et Aristote par exemple L expression rationalisme classique vise a le distinguer d un rationalisme elargi et renouvele modernise par la critique kantienne et l apport des sciences experimentales rationalisme critique pour Kant et Karl Popper rationalisme applique chez Gaston Bachelard On trouve egalement l expression rationalisme continental pour le distinguer et l opposer a l empirisme anglo saxon Hobbes Locke Hume etc Nous suivrons ici une terminologie distinguant un rationalisme moderne de Descartes a Leibniz d un rationalisme critique pour designer generalement le rationalisme kantien et post kantien independamment des nuances parfois sensibles dont il se compose Le mot de rationalisme fut egalement utilise avant la Renaissance et pendant le Moyen Age il s agissait alors de rationalisme en theologie Sources dans la Grece antiqueL attitude intellectuelle visant a placer la raison et les procedures rationnelles comme sources de la connaissance remonte a la Grece antique lorsque sous le nom de logos qui signifie a l origine discours elle se detache de la pensee mythique et a partir des sciences donne naissance a la philosophie Platon ne voit dans la sensibilite qu une pseudo connaissance ne donnant acces qu a la realite sensible materielle et changeante du monde Se fier a l experience sensible c est etre comme des prisonniers enfermes dans une caverne qui prennent les ombres qui defilent sur la paroi faiblement eclairee pour la realite meme Que nul n entre ici s il n est geometre fait il graver au fronton de son ecole l exercice des mathematiques nous apprend a nous detacher de nos sens et a exercer notre seule raison prealable necessaire a la dialectique philosophique La connaissance du reel est connaissance des Idees ou essences realites intelligibles et immuables et cette connaissance est rationnelle Il y a en ce sens un rationalisme platonicien Aristote au contraire appuie sa philosophie sur l observation concrete de la nature physis et pose les bases de la logique formelle dans son Organon nous l appellerions aujourd hui logique generale de ce que l on appela par la suite la metaphysique au dela de la physis c est a dire au dela de la nature de l ethique ethique a Nicomaque Rationalisme moderneOrigine et caracteristiques du rationalisme moderne Ce n est pas l usage de la raison ni sa revendication qui suffit a definir le rationalisme comme doctrine Le rationalisme moderne se constitue et se systematise a la fin de la Renaissance dans le cadre de la controverse ptolemeo copernicienne qui aboutit a la mathematisation de la physique Apres le proces de Galilee 1633 et conforte dans le projet de reformer la philosophie dont le cardinal de Berulle lui avait fait une obligation de conscience quelques annees auparavant Rene Descartes concretise son projet en publiant plusieurs ouvrages de philosophie notamment le celebre Discours de la methode 1637 et les Meditations metaphysiques 1641 Descartes avec son Cogito ergo sum devient ainsi l un des principaux representants du rationalisme moderne Le rationalisme moderne repose sur le postulat metaphysique selon lequel les principes qui sous tendent la realite sont identiques aux lois de la raison elle meme Ainsi en est il du principe de raison determinante ou de raison suffisante que Leibniz dans les Essais de Theodicee 1710 formule de la maniere suivante C est que jamais rien n arrive sans qu il y ait une cause ou du moins une raison determinante c est a dire quelque chose qui puisse servir a rendre raison a priori pourquoi cela est existant plutot que non existant et pourquoi cela est ainsi plutot que de toute autre facon Puisque rien n existe ou n arrive sans cause il n est rien des lors qui ne soit en droit intelligible et explicable par la raison Dans le cadre de l onto theologie cette identite de la pensee et de l etre trouve sa justification ultime en Dieu createur du monde et de ses lois d une part de la raison humaine et de ses principes d autre part Ce en quoi le rationalisme ainsi compris s accomplit pleinement dans l idealisme philosophique auquel Hegel donnera sa forme la plus systematique dans la formule ce qui est rationnel est effectif et ce qui est effectif est rationnel Preface des Principes de la philosophie du droit Il en resulte que la raison contenant des principes universels et des idees a priori exprimant des verites eternelles est immuable et identique en chaque homme C est en ce sens que Descartes dans le Discours de la methode ecrit Le bon sens est la chose du monde la mieux partagee precisant que la puissance de bien juger et distinguer le vrai d avec le faux qui est proprement ce qu on nomme le bon sens ou la raison est naturellement egale en tous les hommes Du point de vue de l origine de nos connaissances le rationalisme est traditionnellement oppose a l empirisme a l irrationalisme et a la revelation Rationalisme et empirisme Selon l empirisme l experience est la source de toutes nos connaissances Comme l explique John Locke dans l Essai sur l entendement humain de 1690 Supposons que l esprit soit comme on dit du papier blanc tabula rasa vierge de tout caractere sans aucune idee Comment se fait il qu il en soit pourvu D ou tire t il cet immense fonds que l imagination affairee et limitee de l homme dessine en lui avec une variete presque infinie D ou puise t il ce materiau de la raison et de la connaissance Je repondrai d un seul mot de l experience en elle toute notre connaissance se fonde et trouve en derniere instance sa source Cette experience c est celle de nos sens externes qui nous permet par exemple de former l idee de couleur mais aussi celle de notre pensee en acte par laquelle nous sommes capables de former l idee de pensee ou de raisonnement Une telle position conduit a une devalorisation de la raison une idee n est aux yeux de David Hume qu une copie d une impression analogue de sorte que tout ce pouvoir createur de l esprit n est rien de plus que la faculte de combiner transposer diminuer les materiaux que nous fournissent les sens et l experience Enquete sur l entendement humain 1748 combinaisons qu il opere selon des relations de ressemblance ou de contiguite Du point de vue de l empirisme donc il n est rien dans l intellect qui n ait ete d abord dans la sensibilite ce a quoi Leibniz retorquera sauf l intellect lui meme Le rationalisme postule en effet l existence en la raison de principes logiques universels principe du tiers exclu principe de raison suffisante et d idees a priori c est a dire independantes de l experience et precedant toute experience Ainsi Descartes admet il l existence d idees a priori et innees telles que l idee d infini de temps de nombre ou l idee meme de Dieu qui est comme la marque de l ouvrier sur son ouvrage idees simples et premieres sans lesquelles l experience sensible nous resterait inintelligible je considere qu il y a en nous certaines notions primitives qui sont comme des originaux sur le patron desquels nous formons toutes nos autres connaissances Lettre a Elisabeth du 21 mai 1643 Aux yeux du rationalisme en effet l experience sensible ne saurait donner de connaissance veritable Platon deja en denoncait le caractere fluctuant et relatif qui ne nous montre qu un jeu d ombres inconsistant et Descartes dans la premiere Meditation metaphysique le caractere trompeur Tout ce que j ai recu jusqu a present pour le plus vrai et assure je l ai appris des sens ou par les sens or j ai quelquefois eprouve que ces sens etaient trompeurs et il est de la prudence de ne se fier jamais entierement a ceux qui nous ont une fois trompes Le rationalisme cependant nous le verrons plus bas sous sa forme critique ne repudie pas l experience sensible mais la soumet a des formes a priori qui la rendent possible et en organisent le donne Rationalisme et irrationalisme Il faut entendre ici par irrationalisme la reference a toute experience ou toute faculte autre que la raison et n obeissant pas a ses lois supposee donner une connaissance plus profonde et plus authentique des phenomenes et des etres et laissant place a une frange d ineffable de mystere ou d inexplicable Le rationalisme s oppose en ce sens au mysticisme a la magie a l occultisme au sentimentalisme au paranormal ou encore a la superstition Seuls font autorite les processus rationnels evidence intellectuelle demonstration raisonnement C est au sentimentalisme romantique que s en prend Hegel dans la preface a la Phenomenologie de l esprit lorsqu il evoque cette pretendue philosophie qui par l absence de concept se donne pour une pensee intuitive et poetique jette sur le marche des combinaisons fantaisistes d une fantaisie seulement desorganisee par la pensee fantastiqueries qui ne sont ni chair ni poisson ni poesie ni philosophie Celui qui pretend toucher la verite dans l experience ineffable du sentiment intime se condamne au silence et a la solitude de l incommunicabilite en d autres termes il foule aux pieds la racine de l humanite Rationalisme et revelation D un point de vue theologique le rationalisme met en avant la lumiere naturelle de la raison par opposition a la connaissance revelee que constitue la foi Contre le fideisme il demande que les articles de la foi et les Ecritures elles memes soient soumis a l examen rationnel Spinoza dans le Traite theologico politique developpe une lecture critique de l Ancien Testament Descartes dans la preface aux Doyens et docteurs de la faculte de theologie de Paris qui precede les Meditations metaphysiques affirme que tout ce qui se peut savoir de Dieu peut etre montre par des raisons qu il n est pas besoin de chercher ailleurs que dans nous memes et que notre esprit seul est capable de nous fournir Selon lui en effet parallelement a la theologie revelee la seule raison nous permet de demontrer l existence de Dieu par l argument ontologique de sorte que l existence de Dieu decoule necessairement de son essence comme il decoule necessairement de l essence du triangle que la somme de ses angles egale deux angles droits Ainsi pour Descartes la recherche de la verite peut se faire par la raison seule sans la lumiere de la foi les Principes de la philosophie Le cogito ergo sum postule que l homme est une substance intelligente qui peut acceder a la verite Rationalisme critiqueLe rationalisme critique issu de l entreprise kantienne peut se caracteriser par trois traits Le renoncement a ses pretentions dogmatiques et metaphysiques L integration de l experience au sein d une dialectique experimentale La reconnaissance par la raison elle meme de ses limites et de son historicite Synthese kantienne Le developpement de la physique experimentale moderne a la fin de la Renaissance avec les figures majeures de Galilee Torricelli et Newton va peu a peu conduire a une revision du statut de la raison dans ses relations avec l experience Hypotheses non fingo je ne forge pas d hypotheses declare Newton la science de la nature reclame l observation des faits et ne peut decouler de seuls principes a priori Kant tres attentif a cette question en prend acte dans la Critique de la raison pure Il y distingue trois facultes La sensibilite ou faculte des intuitions empiriques par laquelle quelque chose nous est donne L entendement ou faculte des concepts Les categories pures de l entendement sont les regles qui nous permettent d organiser a priori l experience par exemple la relation de causalite Aucune de ces deux proprietes n est preferable a l autre Sans la sensibilite nul objet ne nous serait donne et sans l entendement nul ne serait pense De leur union seule peut sortir la connaissance Connaitre c est donc appliquer des concepts a des intuitions de telle sorte que des pensees sans contenu sont vides des intuitions sans concepts aveugles La raison ou faculte des Idees Une Idee ne pouvant correspondre a aucun objet donne dans l experience Dieu l immortalite de l ame la liberte de tels objets suprasensibles ne peuvent donc etre objets de connaissance au sens defini plus haut On peut par consequent estimer que Kant opere la synthese entre l empirisme et le rationalisme en donnant droit a l un comme a l autre Mais cette synthese s opere en realite dans le sens d un rationalisme critique Que toute notre connaissance commence avec l experience cela ne souleve aucun doute Mais si toute notre connaissance debute avec l experience cela ne prouve pas qu elle derive toute de l experience Le donne empirique en effet donne certes irreductible a la raison ne peut etre organise et donner lieu a une connaissance qu a travers les formes a priori de notre esprit formes a priori de la sensibilite elle meme que sont l espace et le temps categories pures de l entendement qui constituent pour ainsi dire la structure logique inherente a notre esprit structure dans laquelle nous mettons en forme les donnees issues de la sensibilite pour en operer la synthese et dont derivent toutes les fonctions logiques de nos jugements Pour le tableau complet des categories voir l article Critique de la raison pure Si bien que la realite nous reste a jamais inconnaissable nous n avons acces qu a une realite phenomenale Si donc Kant se detourne du postulat cartesien des idees simples et innees constitutives d une connaissance pure independante de l experience dogmatisme c est pour leur substituer les categories pures de l entendement qui sont la condition de possibilite de toute experience possible Abandon des pretentions metaphysiques En consequence de la critique kantienne pretendre connaitre des objets suprasensibles releve d un usage illegitime de la raison Ainsi se trouvent invalidees les tentatives de demonstration rationnelle de l existence de Dieu contre l argument ontologique de Saint Anselme et de Descartes Kant explique que du simple concept de Dieu on ne peut en deduire analytiquement l existence J ai donc du supprimer le savoir pour lui substituer la croyance C en est fini des pretentions metaphysiques et du dogmatisme de la raison Dans les annees 1830 Auguste Comte en son Cours de philosophie positive decrit en ces termes l etat positif ou scientifique auquel est enfin parvenue l intelligence Enfin dans l etat positif l esprit humain reconnaissant l impossibilite d obtenir des notions absolues renonce a chercher l origine et la destination de l univers et a connaitre les causes intimes des phenomenes pour s attacher uniquement a decouvrir par l usage bien combine du raisonnement et de l observation leurs lois effectives c est a dire leurs relations invariables de succession et de similitude Il s agit desormais de comprendre comment un phenomene se produit Les faits observables sont lies par des lois qui en expriment seulement les relations constantes C est dans cette perspective qu en 1964 E Kahane dans son Dictionnaire rationaliste peut le definir de la maniere suivante Le rationalisme comporte explicitement l hostilite a toute metaphysique le refus de tout inconnaissable a priori et l exclusion de tout autre mode allegue de connaissance tel que la revelation l intuition reduite a elle seule etc Dialectique experimentale Loin d exclure l experience le rationalisme kantien en fait l une des deux sources de nos connaissances et reconcilie en ce sens rationalisme et empirisme Mais il convient de preciser ce que l on entend des lors par experience Elle ne saurait consister comme le croirait un empirisme naif en un fait brut en une verite du reel se donnant a nous dans l evidence du constat immediat Sans la mediation de la raison en effet l experience resterait muette et ne saurait rien nous enseigner Les faits ne parlent pas d eux memes Kant il faut encore ici l evoquer y insiste longuement dans la Critique de la Raison Pure Les physiciens comprirent que la raison ne voit que ce qu elle produit elle meme d apres ses propres plans et qu elle doit prendre les devants avec les principes qui determinent ses jugements suivant des lois immuables qu elle doit obliger la nature a repondre a ses questions et ne pas se laisser conduire pour ainsi dire en laisse par elle car autrement faites au hasard et sans aucun plan trace d avance nos observations ne se rattacheraient point a une loi necessaire chose que la raison demande et dont elle a besoin Il faut donc que la raison se presente a la nature tenant d une main ses principes qui seuls peuvent donner aux phenomenes concordants entre eux l autorite de lois et de l autre l experimentation qu elle a imaginee d apres ces principes pour etre instruite par elle il est vrai mais non pas comme un ecolier qui se laisse dire tout ce qui plait au maitre mais au contraire comme un juge en fonctions qui force les temoins a repondre aux questions qu il leur pose Ainsi si vous forcez ou dressez un tigre a sauter au travers d anneaux enflammes vous pourrez en conclure tranquillement Le tigre est un animal qui saute au travers d anneaux enflammes Ce qui nous est ainsi schematiquement trace c est la demarche de la science experimentale telle qu elle se dessine depuis Galilee Observation rigoureuse d un phenomene que l on cherche a expliquer Formulation d une hypothese qui est un enonce que l on peut soumettre a un test Experimentation par l elaboration d un montage permettant d eprouver la validite de l hypothese De la meme facon qu un homme d experience est non seulement un homme qui a vecu mais un homme qui a su reflechir a ce vecu pour en tirer des lecons l experience pour le savant n a de sens qu en fonction de problemes qu il cherche a resoudre et d hypotheses rationnelles qu il elabore a cette fin Gaston Bachelard dans Le Nouvel Esprit scientifique l explique en ces termes une experience ne peut etre une experience bien faite que si elle est complete ce qui n arrive que pour l experience precedee d un projet bien etudie a partir d une theorie achevee Les enseignements de la realite ne valent qu autant qu ils suggerent des realisations rationnelles Le dispositif experimental effectue en laboratoire est rationnellement planifie et construit par le chercheur en fonction des hypotheses qu il veut tester Il necessite un appareillage complexe qui est lui meme le resultat d un effort theorique anterieur Comme le precise Bachelard op cite il faut que le phenomene soit trie filtre epure coule dans le moule des instruments produit sur le plan des instruments Or les instruments ne sont que des theories materialisees Il en sort des phenomenes qui portent de toutes parts la marque theorique D ou l expression par ce meme philosophe de rationalisme applique L experience en laboratoire n est donc pas le reel a l etat brut mais un reel reconstruit et selectif dans lequel la verite s elabore a travers un ensemble d operations et de procedures rationnelles qui corrigent notre approche naive et spontanee Rien n est donne tout est construit Se dessine en ce sens une dialectique experimentale un dialogue et une collaboration entre l experience et la raison ouvrant la voie selon l expression de Bachelard a une epistemologie non cartesienne Historicite de la raison Avec la Phenomenologie de l esprit Hegel mettait en avant l historicite d une raison qui developpe ses formes a travers l histoire du monde Comme le fait observer Gilles Gaston Granger la grande decouverte hegelienne c est le caractere historique de la raison et cette prise de conscience de l historicite determine le rationalisme contemporain A une conception fixiste de la raison telle qu elle apparait encore dans les categories de l entendement dont Kant entendait dresser une fois pour toutes le tableau complet s oppose desormais une conception dynamique de la raison toujours liee au contexte historique et epistemologique dans lequel elle se deploie Bachelard en introduisant dans La formation de l esprit scientifique 1938 la notion d obstacle epistemologique veut montrer une pensee rationnelle en prise a des crises de croissance C est dans l acte meme de connaitre intimement qu apparaissent par une sorte de necessite fonctionnelle des lenteurs et des troubles C est la que nous montrerons des causes de stagnation et meme de regression c est la que nous decelerons des causes d inertie que nous appellerons des obstacles epistemologiques Les conquetes progressives du rationalisme se font des lors contre la raison elle meme de sorte qu en revenant sur un passe d erreurs on trouve la verite en un veritable repentir intellectuel Passe d erreurs generalisation hative de la connaissance habitudes verbales pragmatisme substantialisation realisme naif qui sont autant d obstacles que la science dresse face a elle meme Preciser rectifier diversifier ce sont la des types de pensees dynamiques qui s evadent de la certitude et de l unite et qui trouvent dans les systemes homogenes plus d obstacles que d impulsions L esprit rationnel dans le cadre des sciences doit etre un esprit critique toujours en alerte devant ses propres facteurs d inertie toujours prompt a remettre en question ses propres conquetes Reste ensuite la tache la plus difficile mettre la culture scientifique en etat de mobilisation permanente remplacer le savoir ferme et statique par une connaissance ouverte et dynamique dialectiser toutes les variables experimentales donner enfin a la raison des raisons d evoluer Dans un meme ordre d idees Karl Popper dans La logique de la decouverte scientifique tente de montrer que le caractere d une theorie scientifique tient a sa refutabilite On ne peut en effet a partir d experiences singulieres aussi nombreuses soient elles conclure a l universalite d une loi Mais on peut la tester il suffit de montrer une seule observation contraire a un enonce universel pour etre certain que cet enonce est faux Le vrai n est donc pas la simple reciproque du faux de sorte qu on ne peut verifier une hypothese mais seulement essayer de l infirmer Une theorie ne sera des lors tenue pour vraie qu autant qu elle resistera aux tests experimentaux pour la mettre en echec C est dire par consequent que la science progresse par refutations et experimentation rien n est definitif la verite est toujours provisoire La raison n est plus concue comme un systeme clos et rigide de principes determines a priori mais bien comme une realite plastique et dynamique comme un processus constructif dont temoigne l histoire meme de la connaissance Ce que l on considere comme etant une explication rationnelle depend donc etroitement du contexte historique dans lequel elle est formulee de l etat des connaissances et de l evolution des techniques d observation et d experimentation Le concept de probabilite par exemple introduit dans les modeles complexes de la science des particules ou celui de modele local ne pouvaient intervenir a titre d explication rationnelle dans le cadre de la physique galileenne ou newtonienne Comme le precise Gilles Gaston Granger Ainsi la science progresse t elle par depassements successifs des formes perimees de la raison L irrationalite veritable apparait donc plutot comme une regression vers des formes anachroniques de l explication ref necessaire Tel se veut le rationalisme critique elargi un rationalisme debarrasse de ses prejuges metaphysiques intimement mele au developpement des sciences qui se construit par depassement de ses propres formes historiques et issu d une conception dynamique de la raison Critique contemporaine du rationalisme moderneHans Jonas dans Le Phenomene de la vie vers une biologie philosophique fut l un des premiers a critiquer le dualisme cartesien entre le corps et l esprit Le dualisme cartesien laissa la speculation sur la nature de la vie dans une impasse si intelligible que devint selon les principes de la mecanique la correlation de la structure et de la fonction a l interieur de la res extensa celle de la structure accompagnee de fonction avec le sentiment ou l experience modes de la res cogitans fut perdue dans la separation et par la le fait de la vie lui meme devint inintelligible au moment meme ou l explication de son effectuation temporelle semblait assuree Le dualisme cartesien et l absence de finalisme dans la technoscience sont pour Vittorio Hosle disciple de Hans Jonas les causes principales de la crise ecologique Le sociologue italien Franco Ferrarotti remet en cause le rationalisme mecaniste dont Descartes est l une des sources Selon Jean Claude Larchet en faisant de la raison la principale faculte de connaissance de l homme on relegue au second plan son esprit ou intellect faculte de contemplation des realites surnaturelles La valorisation de la raison et de l approche rationnelle des phenomenes favorise non seulement le developpement d une forme de philosophie qui s affranchit de la theologie dont elle n etait jusqu alors que la servante mais encore l essor des sciences qui se developperont considerablement a partir du XVII e siecle a la suite de la revolution copernicienne Point de vue chretienLe Syllabus de Pie IX du 8 decembre 1864 condamne le rationalisme comme incompatible avec la foi L Encyclique Fides et ratio de Jean Paul II du 14 septembre 1998 analyse les rapports entre la foi et la raison Point de vue artistiqueIl existe un courant architectural rationaliste voir Architecture rationaliste Notes et referencesG G Granger La raison P U F Que sais je 1955 Hans Jonas Le phenomene de la vie vers une biologie philosophique De Boeck Universite p 69 lire en ligne Vittorio Hosle Philosophie de la crise ecologique Payot 2011 p 80 Franco Ferrarotti La revolte contre le rationalisme mecaniste Societes 2005 1 no 87 pages 91 a 100 2005 lire en ligne consulte le 26 09 2020 Jean Claude Larchet Les fondements spirituels de la crise ecologique Syrtes p 73 74Voir aussiSur les autres projets Wikimedia rationalisme sur le Wiktionnaire Bibliographie Rene Descartes Discours de la Methode 1637 Rene Descartes Meditations sur la philosophie premiere 1641 Baruch Spinoza Traite theologico politique 1670 Gottfried Wilhelm Leibniz Nouveaux Essais sur l entendement humain 1705 Emmanuel Kant Critique de la Raison pure 1781 seconde edition 1787 Georg Wilhelm Friedrich Hegel La Phenomenologie de l Esprit 1807 Auguste Comte Cours de philosophie positive 1830 1842 Gaston Bachelard Le Nouvel Esprit scientifique 1934 Gaston Bachelard La Formation de l esprit scientifique 1938 Karl Popper La Logique de la decouverte scientifique 1934 ed francaise Payot Gilles Gaston Granger Pour la connaissance philosophique Paris Editions Odile Jacob 1988 Articles connexes Raison Raisonnement Rationalisation Philosophie analytique ScientismeLiens externes Ressources relatives a la recherche JSTOR PhilPapers objet Notices dans des dictionnaires ou encyclopedies generalistes Den Store Danske Encyklopaedi Dictionnaire historique de la Suisse Gran Enciclopedia Catalana Internetowa encyklopedia PWN Store norske leksikon Universalis Notices d autorite BnF donnees LCCN GND Israel Tchequie Portail de la philosophie Portail des Lumieres Portail du scepticisme rationnel Portail 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